Tartala’krem

Bien avant que Rahan ne perce sa première dent, bien avant que Moh’hr ne parte en quête de la  « Montagne qui crache des nuages », bien avant que n’éclate la Guerre du feu, il y a environ 1,7 million d’années avant Jésus-Christ pour être plus précis, avant le cuit donc, Sâr-kô courait et parlait cru…

Sâr-kô avait couru droit devant lui jusqu’à ce que son shirak’er-pê’hêr lui passe dans le dos. Là, il s’était arrêté. Comme tous ceux de sa tribu, il n’avait aucune confiance dans ce morceau obscur qui s’accrochait à ses pas et l’accompagnait dans la lumière. Shirak’er-pê’hêr, c’était du crépuscule qui n’attendait qu’une erreur de l’ôm pour l’entraîner dans les territoires où les corps cessent de souffler de petits vents par les orifices. Sâr-kô se méfiait encore plus de son shirak’er-pê’hêr que celui-ci prenait souvent l’allure de l’ oiseau au gros bec qui mange les bêtes qui ne soufflent plus de petits vents par les orifices. parfois le shirak’er-pê’hêr prenait même la forme du Vô-Toor ou celle du Krô-Kô

Maintenant, la sueur ruisselait dans les plis de sa peau. Il eut un frisson. De grosses ges’ti-kuls bleues le couvraient de la tête aux pieds. Il se trouvait très éloigné du camp de la tribu. Il devait regagner au plus vite son territoire avant que la boule dans le ciel ne disparaisse dans la montagne qui fume. Mais comment avancer sans avoir le shirak’er-pê’hêr dans le dos ? Sâr-kô ferma les yeux et fut emporté hors de son corps aux pays des images. Un long moment plus tard, il grogna : « Eur-êkaa. » Pour tromper son ombre, il courrait parfois comme le kler-ko-kler des rivières qui a des doigts en bec d’oiseau. Il se remit debout et s’élança. Au premier pas en marche arrière, il trébucha et roula au fond d’un petit ravin où, par chance, un épais coussin mou et gras amorti sa chute.
Mêrd’, grogna-t-il.
Ce qui avait amorti sa chute avait une odeur entêtante.
Kêss, grogna-t-il.
Ça lui rappelait quelque chose, mais il n’arrivait pas à mettre un nom dessus. Sâr-kô ferma les yeux et fut emporté hors de son corps aux pays des images. Enfin il eut le mot qui dit l’image dans la gorge.
Kâ-kâ bôoz , grogna-t-il.
Mais kâ-kâ bôoz de quoi ? Il en goûta un petit bout. Ça avait un goût de frez’boa, de punê’ze et de rhô’z . Il ferma les yeux pour être emporté hors de son corps aux pays des images. Un long moment plus tard, il poussa un petit cri et se frappa les fesses de contentement.
Krôt Pin’o-kio, grogna-t-il.
Les gros Pin’o-kio, avec sur leur visage ce long nez qui cueillent les feuilles comme le font les deux doigts d’une main, avec cette peau épaisse, ces grandes oreilles et ces grosses Krôt qui rendent invulnérable celui qui s’en badigeonne. C’était jour de chance pour Sâr-kô qui sentit se retrousser les coins de sa bouche vers ses oreilles.
Eurh eurk, grogna-t-il.
Et il se puis roula longuement dans la krôt pin’o-kio.
Tartala’krem, umpê-umpê, grognait-il  en se frappant les fesses de contentement tant il se sentait invulnérable.

Cependant le jour déclinait dangereusement.

Sous les vents du beau monde. Chapitre 1

– Glossaire –

Eur-êkaa ! : A y est !
Eurh eurk : Ha ha !
Frez’boa : fiente de pigeon
ges’ti-kul: mouche à merde.
kâ-kâ bôoz : excréments
Kêss: Qu’est-ce?
kler-ko-kler : écrevisse
Krô-Kô : tigre
Krôt: bouse
Mêrd’: Zut !
ôm : préhistorique
Pin’o-kio : mammouth
Punê’ze : crotte de bique
Rhô’z : caca de mouche à merde
Shirak’er-pê’hêr : ombre d’ôm
Tartala’krem : au c… la balayette !
Vô-Toor : Hippopotame
Umpê-umpê: y’a d’la joie !

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