Les
tartinoux, les
crapignolettes et les
délichiousses de caviar et de truffes entrent pour une large part dans la nourriture de nos hautes sphères bretonnes.Outre ces grignotis, il en est de particuliers qui sont sous une autre forme. Ce sont d’abord les
glaouignasses, sorte de boules molles qui constituent la partie solide d’une lourde soupe et figurent de joyeuses cervelles siamoises, et puis la
bousignôle, grossière farce, qu’on enferme dans un sac et que l’on cuit avec la viande d’un
petit porteur dans une vaste marmite pour lui donner ce goût qui excite bien des appétits – cette préparation est également un excellent emplâtre sur les jambes de bois qu’elle fait briller bien mieux que la surfaite popotte des antiquaires du Lubéron.La manière dont se nourrit notre noblesse, et particulièrement le grand nombre de mets composés de caviar et de truffes dont il surcharge ses bourrelets et infarctus sportifs, à souvent fait demander si pareil gavage n’influait pas sur son caractère, et si cette aristocratie hilare qui rend un son qui lui est propre, et qui n’est l’écho d’aucun autre, ne devait en partie ce tempérament exceptionnel – tout comme sa capacité à choir de haut sans bris – à son régime alimentaire que l’envieux Grec lui envie.
On ne saurait le nier : cet ancien régime agit sur le moral des choses, et s’il est des aliments qui poussent, par exemple, à la volupté comme les beignets de chômeurs, les tripes de sans-logis, les rillauds de chômeurs ou le caque-quarante farci, de même il y en a de tout à fait favorables à l’austérité comme la Bernie en pièces, la Boutin de Noël et le Bé-seize à la vaticane.
Cependant il ne faudrait point vouloir expliquer notre aristocratie dans toute sa complexité par une influence qui, loin d’être exclusive, n’est, croyons-nous, qu’accessoire. Pas plus que le Breton de base, pusillanime et téméraire, ne s’explique par l’abus de blé noir en crampousses, qui sont les tortillas armoricaines, ou autres poulpouts.